Vous êtes présidente d’Agriculteurs de Bretagne. Que fait cette association ?
Le monde agricole est controversé. Comment contribuer à ce que les questions qui sont posées dans le grand public et ce qui se passe dans le monde agricole se rencontrent ? Parce qu’on ne peut plus rester chacun dans sa case, ce n’est pas possible. Nous, agriculteurs, ce qu’on fait n’est pas banal : on fournit l’alimentation, la matière première de ce que les gens ont dans leur assiette. En termes de responsabilité, d’investissement dans le travail, c’est énorme ! On essaye à travers l’association de renouer ces liens et ce dialogue qui, au fil du temps, ont été distendus.
C’est paradoxal, tout le monde se presse pour défendre les agriculteurs, il n’y a qu’à voir le débat présidentiel, et pourtant, ils n’ont pas une bonne image…
Oui ! Quand on interroge le grand public, très massivement, près de 90 % des Bretons disent qu’ils sont attachés à leurs agriculteurs. C’est sans appel. Par contre, ils ne savent plus ce que font les agriculteurs. Si on ne parle pas, si on n’explique pas, à qui est-ce qu’ils vont faire confiance ? À d’autres, qui ne sont pas agriculteurs : des associations environnementales, des ONG, éventuellement les médias…
Les agriculteurs se sentent mal aimés ?
Oui. On a une double peine aujourd’hui. D’abord, quelque chose qui tient de la crise économique, des crises conjoncturelles ou structurelles. Et à côté, une crise morale. On a des agriculteurs qui ont investi, qui ont changé leurs pratiques, qui sont conscients de ce qu’ils font, qui ont intégré des tas de normes et de réglementations, et qui se retrouvent encore sur le banc des accusés. Maintenant, c’est sur le bien-être animal, par exemple. Et on n’arrive pas à battre ça en brèche. C’est un peu une époque d’agriculture-bashing ! Dans la presse, la radio, on nous dit que l’industrie agricole, c’est pas bien, la manière dont on élève nos animaux, c’est pas bien… Il n’y en a que pour le tout petit élevage, à côté de chez soi et tant qu’à faire bio ! Mais il faut qu’on prenne en compte une mutation en cours, où le consommateur demande des explications sur ce qu’il a dans son assiette, des demandes spécifiques.
Retrouvez la suite de cet entretien dans le magazine Bretons de juin 2017.