Bretons : Comment a repris l’activité de votre librairie à partir du moment où vous l’avez rouverte le lundi 11 mai ?
Dominique Fredj : Ça a été un moment un peu particulier parce qu’on ouvrait à 14 heures, et devant les grilles il y avait soixante personnes qui attendaient. Ça a fait chaud au coeur, et en même temps, ces soixante personnes qui sont entrées nous ont toutes dit : “Merci d’être ouvert”. C’était émouvant. Et nous aussi, on les remercie d’être là.
Vous pensez que certains de vos clients étaient “en manque” ?
Probablement, oui. Mais c’est surtout comme si on allait visiter un ami qui se rétablit. Et on a vraiment senti, même pendant le confinement d’ailleurs, une forme de communauté qui s’est mise en place, notamment au travers des réseaux sociaux. Depuis, beaucoup de Rennais sont présents et viennent quotidiennement. On est même surpris par leur engouement. On s’attendait à un effet ressort, mais là, on est au-delà de ça.
On se rappelle que les librairies et les livres n’ont pas été considérés comme “essentiels” à la vie quotidienne des Français. C’était un peu violent comme considération. Comment avez-vous ressenti ça ?
J’avoue que j’ai été surpris. Bon, évidemment, tout le monde l’a été. Cette annonce un samedi soir à 20 h 30 par le président, c’était un peu brutal. Mais, dans un premier temps, lorsqu’il a été annoncé que les commerces “non essentiels” devaient fermer, très honnêtement je ne me sentais pas concerné. Mais j’ai réalisé ensuite que nous étions bel et bien concernés. À la fois, nous avons compris la gravité de la situation et la nécessité de rentrer dans ce confinement, et en même temps, j’ai trouvé que les termes étaient très mal choisis. Bien sûr, se nourrir est important, mais nourrir son activité intellectuelle aussi. Je pense qu’on aurait pu présenter les choses différemment, plutôt que de dire que les livres et la lecture sont “non essentiels” à la vie des Français…
(…)
Retrouvez la suite de cet entretien dans le magazine Bretons n°166 de juillet 2020